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27 mars 2010

Writer Fairy

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Un petit battement d'ailes vers ma passion de toujours a été fait. Ne trouvant pas le temps de me consacrer à de longs écrits en ce moment en raison de mon mémoire, j'ai décidé néanmoins de continuer à écrire cette année en me lançant dans le genre de la nouvelle. Je m'étais déjà essayée à cet exercice il y a quelques années et avais même eu le plaisir de remporter un petit prix, au lycée, lors d'un concours régional. J'ai donc décidé de retenter ma chance cette année, et je n'ai pas hésité à me lancer en voyant que la MJC de Metz lançait fin 2009 son premier concours de nouvelles sur le thème "J'ai du talent mais personne ne le sait". La remise des prix a eu lieu hier soir, et si je n'ai pas eu le bonheur de faire partie des trois premiers lauréats, j'ai tout de même eu le plaisir de voir ma nouvelle selectionnée auprès de vingt autres pour être éditée dans un recueil collectif : Recueil de nouvelles illustrées, édité par ILL Editions et à présent commercialisé. Ce n'est certes pas grand chose, car je n'ai pas gagné de prix, ce qui m'a tout de même un peu déçue, que ce texte n'est pas le plus proche de moi que j'aie pu écrire, mais... eh bien, j'en suis tout de même fière. Fière et émue d'avoir retrouvé ma nouvelle publiée dans un vrai livre, qu'elle ait été illustrée par un artiste, et d'avoir ainsi fait un petit pas, un petit battement d'ailes littéraire, me confortant dans ma passion...

Je souhaitais donc partager ici mon (premier ?) texte publié, qui s'intitule L'objet d'une passion.

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L’objet d’une passion

C’est par hasard que je découvre cette annonce. Je suis en train de faire la queue à l’entrée du réfectoire derrière Emma qui discute avec l’une de ses amies. Elle avance d’un pas, lorsque j’aperçois l’affiche à travers ses cheveux auburn, punaisée sur le grand tableau à annonces du bâtiment.

« Afin de favoriser la créativité littéraire chez les adolescents, les trois lycées de la ville, Victor-Hugo, Jean-Jaurès et Louis-Pasteur organisent leur premier concours de poésie commun. Nous invitons chaque élève à prendre la plume sur le thème de « la passion ». Le poème sera dactylographié et composé de 10 vers minimum et de 25 vers maximum. Le concours est gratuit à tout élève inscrit à l’un des trois établissements et ouvert jusqu’au 3 mai, date limite de dépôt des poésies. Les œuvres seront à remettre au secrétariat principal de votre lycée, en cinq exemplaires anonymes accompagnés d’une enveloppe contenant vos noms et coordonnées. Le jury est composé de plusieurs professeurs de français des trois lycées ainsi que de personnalités artistiques et culturelles de la ville. Les trois premiers candidats seront prévenus individuellement fin mai, sans leur révéler leur position, et le palmarès final sera annoncé le 10 juin. Le jury primera trois lauréats, un pour chaque établissement, qui se verront récompensés d’un bon d’achat dans une grande librairie avec un premier prix de 100 euros d’achat, un deuxième prix de 50 euros d’achat, et un troisième prix de 25 euros d’achat. Le lauréat du premier prix fera également l’objet d’un article dans le journal régional.»

            S’ensuit la composition du jury, mais je ne lis déjà plus, méditatif. Un concours de poésie entre tous les lycéens de la ville. L’occasion d’écrire et de faire apprécier son travail par des littéraires confirmés. Je suis tellement absorbé par cette pensée que je ne me rends même pas compte du bouchon qui commence à se former derrière moi. A contrecoeur, j’avance, décidé à en apprendre davantage plus tard.

Je suis rapidement exaucé car à l’heure de français de l’après-midi, le professeur, M. Becker, commence son cours par l’évocation du concours dont les inscriptions s’ouvrent aujourd’hui. Cette déclaration ne suscite guère l’enthousiasme et quelques ricanements se font même entendre. En effet, notre l’établissement, Louis-Pasteur, est un lycée technique et professionnel, ne proposant que la filière scientifique comme voie générale. Nous sommes d’ailleurs le seul des trois établissements à ne pas offrir de parcours littéraire, les deux autres étant des lycées généraux. De fait, la plupart des élèves ici s’intéressent autant à la littérature qu’à leur premier biberon. En outre, dans notre classe de Première STI génie électronique, ce sont les matheux et les manuels qui dominent, mésestimant le français qui est l’une des seules matières littéraires demeurant au programme.

        Je suis conscient que la plupart d’entre vous ne s’intéresse ni à la lecture, ni à l’écriture, poursuit justement M. Becker d’un air quelque peu blasé. Néanmoins ce concours est une expérience qui peut se révéler enrichissante pour vous.

        Mais monsieur, interrompt quelqu’un avec insolence. Pourquoi le lycée participe à un concours littéraire de toute façon ? Ça devrait seulement être proposé aux L !

        Nous participons à ce concours parce que, justement, la créativité littéraire concerne tout le monde, réplique M. Becker. Chacun a le droit d’écrire, quel que soit son domaine de spécialité. Et en tant qu’enseignant, je vous encourage fortement à participer à ce concours afin de vous ouvrir à d’autres horizons.

Je suis d’accord avec ces paroles mais je serais allé plus loin en ajoutant que la littérature n’est pas exclusive aux seules personnes ayant choisi la filière littéraire au lycée. Non seulement ces derniers ne sont pas tous de passionnés, certains y entrant même par dépit, en froid avec les matières scientifiques, mais inversement, les élèves d’autres classes ont le droit de s’intéresser également à la littérature !

Alors que mes années de collégien s’achevaient, j’ai pris le chemin des sciences et technologies industrielles. La physique, les appareils électroniques, les travaux pratiques… Des spécialités qui me parlent et m’intéressent, et ce pourquoi j’ai opté pour cette filière, intéressante et prometteuse. Je dois d’ailleurs admettre que je ne regrette nullement mon choix et que j’y suis même très bien. Mais il se trouve que, tout scientifique et manuel que je sois, j’affectionne également le français. J’aime lire de tout, et en plus, c’est là mon grand secret, j’écris aussi. J’ai toujours aimé écrire et tout petit déjà, j’adorais les rédactions à l’école et créer des poèmes selon mon humeur du moment. Mais dès la fin du collège, il a fallu faire un choix. Et justement, pourquoi faut-il diviser les choses à ce point et partager le baccalauréat en filières si spécialisées ? Pourquoi ne pas pouvoir choisir les matières de son choix avant d’intégrer l’université ? J’aurais ainsi pu étudier les sciences et le français à des niveaux équitables, sans devoir choisir. Si j’ai pris la route des sciences, c’est parce que le reste de la filière littéraire ne m’intéressait guère. Je suis lamentable en langues comme en histoire et seuls le français et la littérature me passionnent… De plus, la propagande lycéenne déshonorant la filière littéraire et ses issues professionnelles ont, je l’avoue, joué en faveur de ma décision finale. 

Je pense que c’est en partie pour cela que je n’ai jamais osé avouer à quiconque ma passion secrète pour l’écriture. Dans la société actuelle où les littéraires sont rabaissés dès leur adolescence au profit des scientifiques et où la lecture s’efface au profit du multimédia chez les jeunes, comment pourrais-je m’imposer, timide et ayant de surcroît choisi le « camp ennemi » ? Cependant, je sais que je suis doué. Je sais manier les mots. Et les seules personnes ayant jamais lu quelques unes de mes créations, à savoir, mes professeurs de français de collège à travers des rédactions, avaient reconnu mes capacités. J’ai du talent, mais personne ne le sait. Tout simplement.

Mais ce concours va changer la donne. Ce sera l’occasion pour moi d’écrire quelque chose qui sera lu par des personnes à même de juger et d’apprécier ma créativité. Je vais écrire pour ce concours sans le révéler à personne. Si je gagne, mon talent sera assurément reconnu par la ville et surtout, par mon entourage, à commencer par mes anti-littéraires de camarades de classe. Je leur prouverai mes aptitudes.

Les jours se succèdent tandis que l’annonce du concours de poésie s’épand dans le lycée. La plupart des élèves n’y prêtent guère attention, peu intéressés, alors que d’autres décident de tenter leur chance, mais plus par prétention que par véritable ambition lyrique. D’autres encore se lancent sans tarder, dans un pur esprit d’émulation et persuadés que « pondre un poème c’est bidon » bien qu’ils n’aient aucune connaissance des règles propres à la poésie. Quelques filles niaises se déclarent charmées par l’idée et affirment également participer, alors que leurs seules notions poétiques se résument aux chansons de leurs groupes favoris. Au final, les uniques participants du lycée sont loin d’être sérieux et je présume même être le seul de mon établissement à me sentir réellement concerné par ce concours.

Toutefois, je ne parviens pas à décider sur quoi écrire. Le thème est « la passion ». Je suis censé évoquer quelque chose qui me passionne, certes, mais quoi ? Ecrire m’est naturel, j’ai déjà rédigé des centaines de poèmes dans ma vie, mais lorsque le thème est imposé, voilà qui restreint quelque peu la créativité. Pourtant, « la passion » ne semble pas être un sujet ardu en soi, mais quel pourrait être l’objet de ma passion en quelques vers ?

Je suis en salle de travail, le stylo incliné sur une page encore vierge lorsque j’aperçois Emma qui entre avec ses amies. Elle remarque ma présence et me sourit, attention à laquelle je réponds volontiers avant de la contempler s’éloignant vers les ordinateurs. Elle était dans ma classe de troisième, à l’issue de laquelle elle a choisi le même lycée que moi, se dirigeant vers un BEP Secrétariat. J’ai toujours eu un faible pour Emma, et je crois que j’étais déjà un peu amoureux d’elle au collège, même si je ne lui ai jamais rien avoué. Bien que n’appartenant pas au même groupe d’amis et nous connaissant peu, nous nous saluons toujours, échangeant même parfois quelques paroles, et avec la maturité du lycée, je ne la trouve que plus jolie et captivante.

Je suis en train de songer à Emma, l’esprit encore tout occupé du sourire qu’elle m’a lancé, lorsque deux copains de classe arrivent et que l’un d’eux me gratifie d’un coup de coude complice, ayant suivi mon regard.

« Ah ouais, elle est mignonne la petite Emma, hein ? s’esclaffe-t-il avec un clin d’œil. »

Ricanements de mâles complices, sous-entendus salaces, tout y passe. Je fais mine de plaisanter avec eux même si leur immaturité m’agace et que j’aimerais me retrouver seul afin de trouver une idée de poème valable. Mais tandis que les deux compères poursuivent leurs allusions de jeunes mâles en mal de petites-amies, le déclic me vient soudain. Emma. Pourquoi ne pas écrire sur elle ? Je suis amoureux d’elle depuis deux ans, faisant d’elle mon autre secret, avec l’écriture. Alors pourquoi ne pas marier les deux ? Ainsi, si je gagne le concours, mon poème pourra même faire office de déclaration d’amour. Elle en serait surprise, ne se doutant pas de mes talents d’auteur, et serait ravie de se découvrir comme étant l’objet de mon triomphe. Oui, c’est décidé. Emma sera mon sujet. Ma muse. Après tout, de grands écrivains ont écrit sur des femmes, n’est-ce pas ? Et quoi de mieux que la fille que l’on aime pour illustrer la passion ?

Je passe les jours qui suivent à composer mes vers, prenant soin de rédiger quelque chose de beau autant d’un point de vue stylistique qu’émotionnel. Je griffonne mes mots en pensant à Emma, ou en la contemplant lorsque par chance elle se trouve dans mon champ de vision. Emma… Même son prénom est littéraire. Mes sentiments pour elle se déclinent en plusieurs passions, divers penchants, allant de son regard à son sourire, traversant sa voix et sa démarche. Je rédige et barre. Je compte et retravaille. Je fredonne et soupire. Emma m’inspire. L’entreprise se révèle aussi créatrice que cathartique. Finalement, après plusieurs jours consacrés à mes vers, je parvins à une version que j’estime digne d’elle et représentant lyriquement ma passion.

A une semaine de l’échéance du 3 mai, je remets enfin mon poème. Cheminant seul vers le secrétariat, je tiens serrée sous le bras ma grande enveloppe brune. La secrétaire l’ajoute à la pile réunissant celles des autres participants du lycée. C’est davantage que je ne le pensais… Mais j’y crois. Je peux gagner.

Arrive alors l’attente, l’impatience, l’appréhension, l’excitation… Les jours défilent et les semaines se succèdent bientôt. J’ai peur de la réponse. Dans les deux cas, je devrais recevoir un courrier à la fin du mois, disent-ils. Mais qu’en sera le verdict ?

Enfin, le 31 mai, je découvre une enveloppe posée sur mon bureau en rentrant à la maison. La réponse du concours. L’esprit et le corps mêlés de fébrilité et d’angoisse, j’érafle l’enveloppe d’une main suintante et en délivre la lettre.

« Cher Monsieur Clémont,

Nous vous remercions d’avoir participé à notre concours de poésie avec votre poème Il Aima. Malheureusement, nous sommes au regret d’avoir à vous annoncer qu’en dépit de ses qualités littéraires, le jury n’a pas retenu votre poème pour être primé.

Nous le regrettons et vous invitons cordialement à la remise des prix qui aura lieu le 10 juin à 15h30, etc… »

Je n’achève même pas ma lecture. Je suis déçu, soumis au désenchantement le plus total. Le style légèrement personnalisé de cette lettre citant les « qualités littéraires » de mon poème me réconforte à peine. Peut-être ont-ils écrit la même chose à chaque perdant ? Le fait de savoir que l’un des trois lauréats vient forcément de Louis-Pasteur, puisqu’il y en a un pour chaque lycée, accroît ma désillusion. Qui peut bien être celui qui m’a chapardé la victoire ? Encore un arrogant qui aura voulu parader même s’il ne sait pas aligner deux mots, s’étant fait aider, sans doute… Adieu mes rêves de poète illustre auprès d’Emma…

Malgré ma déception, je me rends tout de même à la remise des prix. La raison est que cela débutera par un petit concert organisé par la chorale commune aux trois lycées de la ville. Emma en fait partie, chantant en qualité de soprano. Ma décision est prise. Je lui avouerai mes sentiments, en lui remettant mon œuvre sitôt après la remise des prix. Bien que mon poème n’ait pas gagné, il a tout de même été écrit pour elle, et je veux qu’elle le lise. Je veux qu’elle sache.

Le concert défile avec lenteur, et j’appréhende déjà la réaction d’Emma en l’admirant chanter. Lorsque le spectacle s’achève, la cérémonie de remise des prix s’ouvre enfin. C’est le proviseur du lycée Victor-Hugo, à l’initiative du prix, qui prend la parole en commençant par remercier les nombreux participants. A l’issue de son discours, le palmarès est annoncé :

« Le troisième prix est attribué à Mademoiselle Charlotte Vidal, élève de Seconde Générale au lycée Jean-Jaurès pour son poème La lune rouge. »

            Des applaudissements accompagnent cette annonce, sous l’arrivée de la jeune fille, rubiconde, venue acquérir son prix.

« Le deuxième prix va à Monsieur Luc Mayer, élève de Terminale Littéraire au lycée Victor-Hugo avec son Voyageur aveugle. »

            Moi, c’est la jalousie qui m’aveugle à présent. Ainsi, c’est un élève de mon lycée qui remporte le premier prix !

« Enfin, le premier prix du concours revient à Mademoiselle Emma Castel, élève en deuxième année de BEP Secrétariat au lycée Louis-Pasteur pour son poème Des mots. »

            Des mots. Moi, je n’en ai plus aucun. Je suis figé. C’est Emma qui remporte le concours. Mon Emma. Ma muse. Ma passion. Et alors que je l’observe montant sur l’estrade, gracieuse et radieuse et qu’elle commence à faire la lecture de son poème d’une voix musicale, je saisis l’objet de sa passion. L’écriture en soi. Tandis que moi, j’ai opté pour la passion amoureuse, Emma a choisi la passion des mots. Elle aussi a écrit en secret. Ma déception et ma surprise se muent alors en enjouement. Au moins, ce concours m’aura fait prendre conscience de notre passion commune, que nous dissimulions tous deux. Elle a du talent, mais je l’ignorais tout à fait. De plus, Emma a battu tous les autres élèves, même ceux en filière littéraire. Je suis fier d’elle.

            Alors que sa lecture s’achève et que des acclamations panégyriques retentissent dans le public, je froisse subrepticement mon poème. Je n’ose plus. Pas encore… A la place, je me lève et me dirige vers elle, le cœur empli de légèreté et de poésie. Je veux être le premier à la féliciter.

FIN

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Commentaires
M
Ti ringrazio molto, vampirella mia... <3
H
Je l'ai lue il y a quelques jours, dès que j'aurai un petit moment j'en ferai un commentaire plus détaillé si tu le veux, mais je tiens tout d'abord (et avec retard) à te féliciter, car même si tu n'as pas eu de prix tu as tout de même été sélectionnée, et c'est un sacré pas en avant ! Qui t'ouvrira plus facilement les portes d'autres appels à textes, peut-être ? Toutes mes félicitations, ma petite fée ! J'espère que ce sera le premier texte publié d'une longue série ;)<br /> Molti baci !
M
Merci beaucoup, ma chère Lily :)
U
Félicitations, c'est un pas en avant. Tu dois être contente.<br /> J'aime beaucoup cette nouvelle et je suis complètement d'accord avec cette conclusion. Il vaut mieux écrire pour écrire que pour se faire admirer.
Oº°‘¨ ŊεVεяLąηD ♣ Cℓoςε γoųr εyες bųŧ kεεp γoųr miŋd ωidε opεŋ... ¨‘°ºO
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